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Unité de Soins Intensifs Neurologiques – premier matin


Ceci est le quinzième chapitre du récit de mon AVC. Pour commencer par le début de l’histoire, c’est ici.

Burger américain avec salade
Moins de cinq heures après le début de ma crise d’AVC, je connaissais une de mes plus grandes envies de burger.
Photo personnelle – KeyWest USA, FL – août 2018


-« Mon coeur, je suis là » dit Sonia en me caressant la joue.

Je me retourne du mieux que je peux pour la voir, et je m’emmêle dans les perfusions. Echanges de sourire, sans un mot.

J’ai besoin de la rassurer pourtant: comment lui faire comprendre que je sais toujours qui je suis, qui elle est, que mes souvenirs me semblent complets?
Je réfléchis, tout de même à moitié conscient, d’un moyen simple que lui faire comprendre.

« C’est moi mon amour, je suis entier ».
– « Ton anglais? tu te souviens de ton anglais? »
« She sells sea shells on the seashore ».

Voilà, c’est tout ce que je peux dire pour le moment. Je referme les yeux, tandis que Sonia me lâche, en riant: « C’est bien toi, je t’aime ».

Je referme les yeux en me retournant.

Tu me fais tourner la tête…

Soudain, mon bras se met a trembler et la douleur au niveau de mon oeil gauche revient de plus belle. Je crie à nouveau. Une infirmière accourt et ajoute un camant à ma perfusion.

A peine vingt seconde plus tard, tout se met à tourner autour de moi.
Une sensation de vertige à grande vitesse agrémentée d’une envie de vomir et de haut le coeur, que je ne maîtrise ni ne dissimule.

On m’apporte le haricot, que l’on positionne au niveau de mon visage.

Les yeux fermés, je repars de plus belle pour un tour de manège, puis un autre… et encore un autre.

Epuisé, j’ai du m’assoupir: je n’ai aucun souvenir jusqu’à la fin de matinée, vers 11h00 environ.

Une chose est sûre d’après Sonia: je ne dormais pas.
Régulièrement, l’infirmière passait en lui demandant: « Ca y est, il dort? ». Et dès que Sonia bougeait pour me regarder, j’ouvrais les yeux!
La réponse de ma femme était un simple hochement de tête négatif.

Pourtant, il semble que j’aurais du dormir: la thrombolyse, ça fatigue énormément en plus de la crise d’AVC. Et bien, non, je ne me suis pas endormi profondément.

En fait, et cela je me le rappelle parfaitement, j’avais deux préocupations à ce moment là.

J’veux un burger

Je n’ai rien mangé depuis la veille à midi, et j’ai très faim. Déjà au moment du réveil, j’avais hâte de prendre mon petit déjeuner – vous vous souvenez? le pain au chocolat, bien chaud, que je n’ai pas pris.

Donc en fin de matinée, je me sens affamé. Et plus particulièrement, j’ai envie d’un burger, un vrai, pas celui d’un fast-food.

Je le vois mon burger, deux beaux steaks saignants, avec un belle feuille de salade, deux tranches de tomates, une compotée d’oignon.

Une tranche de bacon, délicatement posée du cheddar fondu.
Les buns préparés avec une sauce poivre.

Un accompagnement « light » de coleslaw et salade fera l’affaire.

Je me doute bien que l’hôpital ne sera pas en mesure de me donner mon burger.
En revanche, j’imagine trés bien que Sonia va pouvoir se rendre au centre ville d’Orsay – l’hôpital est situé en plein coeur de ville.
Je compte sur Sonia pour me rapporter mon burger de rêve.

Que nenni! Quand je parle de mon projet de burger avec l’infirmière: elle éclate tout bonnement de rire, me répond:
– « Là, vous vous reposez et vous mangerez peut-être un peu ce soir si tout va bien. »
Puis elle tourne les talons et s’en va.

Je m’en trouve fort marri.
Finalement, je n’aurai jamais ce burger.

Avec le recul, je vois dans cet épisode un grand décalage entre la gravité de ma situation et mon premier souhait du moment:

  • Déni du danger dans un réflexe de survivance?
  • Inconscience?
  • Besoin primaire de nourriture à satisfaire?

Au moment où j’écris ces lignes, je n’en sais toujours rien.
Si vous avez une idée du processus psychique qui est derrière, je suis curieux de le connaître: donnez-le moi, s’il vous plaît, en commentaires.


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