Court-circuit


Ceci est le premier chapitre du récit de mon AVC. Pour commencer par le début de l’histoire, c’est ici.

L'impression de court-circuit et d'électrocution de mon cerveau.
L’impression que quelque chose cloche dans mes neurones.
Photo by Ákos Rappay from FreeImages

Pas complètement réveillé, j’ouvre la porte en haut de la bibliothèque où sont cachées les « précieuses ». Je remplis les bols et range la boîte de nouveau en hauteur, hors de portée des chats. En visant à nouveau la porte du regard pour la refermer sans la claquer, voilà que le plafond se met à tourner. « Tiens, ça recommence », cela fait un an que je n’avais pas ressenti de vertige. « La vache! « Ça tourne fort quand même. »

Zzzzziiiiit

« C’est quoi ce flash dans mes yeux? » [….] « Pourquoi je marche pas droit? »

« Mais je … Aîe! Oh putain, mon coude!
Argh, Mon genou! »

Je regarde mes membres du côté droit partir violemment dans tous les sens et se heurter au mur en béton du couloir. Ça vibre dans ma tête, une sorte de buzzer en acouphène. Mais qu’est-ce qui se passe? Je ne comprends pas: je veux bloquer ces mouvements, mais mon corps ne répond plus à droite.
D’accord, je vais la jouer à l’anglaise: avec ma force motrice de gauche, je me plaque contre le mur situé à droite.
Ma jambe et mon bras droits sont immobilisés mais mon côté gauche faiblit et je finis par plier les deux genoux.

Je suis à genoux dans le couloir. Mon côté droit vibre très fort. Le bruit du buzzer dans les tympans m’empêche de penser, je veux m’assoir.

Je rampe littéralement jusqu’aux toilettes, et j’arrive à grimper et me poser sur le siège des WC.
Mon bras droit part dans tous les sens.
Ma jambe droite claque le genou entre la cuvette et le meuble lavabo.

Aucun son

Je vais appeler à l’aide, un truc cloche « N… ».
Aucun son, je ne parviens plus à faire aucun son.

Et cette électricité qui vibre contre mes tempes, il faut qu’elle cesse.
Pur réflexe, mon poing gauche reste sous contrôle, alors je le porte maladroitement à ma tempe, et je cogne, je cogne. Je vais bien finir par faire disjoncter ce truc.

Rien.

« Ok, respire, bloque la mâchoire ouverte, respire.
Concentre-toi, souffle et crie ».
« Aaarrrgh! Sonia, à l’aide! à l’aide! aahhhh… »

Rien

« Recommence, inspire, bloque le souffle et crie ».
« A l’aide, vite, à l’aide! ».

La porte de la cuisine s’ouvre d’un coup, les chats en profitent pour s’y engouffrer.
Sonia : « Qu’est-ce qu’il y a? Qu’est-ce qui se passe? »

Je souffre. Sonia me regarde m’agiter dans tous les sens.
J’ai compris ce qui m’arrive. Je sais qu’il faut faire vite. Je dois réussir à le dire à Sonia.
J’inspire, je fais une pause. La douleur est forte.
Je me lance et dit calmement:

« Appelle les pompiers, je fais un A.V.C. »

Sonia crie immédiatement:
« Ooh Mon Dieu, non! Ne me quitte pas! »

Je crois que je n’oublierai jamais ton regard, ni tes paroles, ma femme, à ce moment précis.
Je vois que tu paniques, tu réussis par prendre ton téléphone, tu joins le 18.
Sonia : « Oui, allô […] mon mari fait un malaise, venez vite […] oui […] il pense que c’est un A.V.C. ».

Je ne peux plus parler. J’ai mal: ma tête est comme branchée sur le 220V depuis ce qui me paraît être une éternité.
J’entends l’échange téléphonique et je me dis « Bon sang, la localisation Sonia, pourquoi tu n’as pas passé ton PSC1 avec moi! ».
Je ne dis rien: je ne peux pas.
L’opérateur guide la conversation. La description que lui donne Sonia est cohérente avec mon auto-diagnostic.
Un médecin urgentiste joint la conversation.
Sonia : « Ils disent qu’il faut t’allonger sur le dos ».

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