Ceci est le septième chapitre du récit de mon AVC. Pour commencer par le début de l’histoire, c’est ici.
Nous nous arrêtons enfin, la porte du camion des pompiers s’ouvre.
– « Ne vous inquiétez pas, nous sommes arrivés à l’hôpital ».
Les pompiers me sortent sur le brancard, je n’entends plus ce qui se dit.
Bloqué sur le dos, les yeux grands ouverts, je vois rapidement le ciel bleu, puis un faux plafond, des néons.
On me stocke dans un couloir, le médecin du SAMU reste à côté de moi.
Je sens la fatigue monter en moi, et je réalise que je suis dans un service d’urgences « en grève ». Je n’ai aucune idée de l’impact que cela peut avoir sur les effectifs disponibles et sur ma prise en charge.
Toujours est-il que je cette situation doit m’inquiéter car j’emploie mes dernières forces pour lâcher:
« C’est ici qu’on attend quatre heures avant d’être soigné, c’est ça? »
Comme je ne parviens plus à articuler suffisamment, le médecin se rapproche et me demande de répéter.
– « Vous rigolez! A partir d’ici vous êtes un VIP, vous ne faites pas la queue! »
Une IRM, vite.
Puis le médecin s’adresse aux pompiers: « OK, on l’emmène à l’IRM tout de suite. Vous restez là le temps des résultats, on décidera s’il peut rester ici ou bien s’il faut l’emmener à Sainte-Anne. »
Nous roulons dans les couloirs, puis au bout d’un moment qui me paraît long, nous arrivons devant une salle de radiologie – ce que je déduis du pictogramme.
« Il est où le manipulateur radio? Y’a personne ici! » s’impatiente le médecin.
Du bout du couloir, quelqu’un lui répond d’aller vers une autre salle.
Nous retraversons les couloirs et rentrons finalement dans un monte-charge.
Arrivés à l’étage, la porte s’ouvre et tandis que je reste à l’intérieur, le médecin sort et sonne vite à un interphone.
Je ne me rappelle pas du début de la discussion, en revanche, je me souviens que le ton a monté.
« Je termine mon examen et on prend votre patient. »
– « On a une thrombolyse confirmée, vous sortez votre patient immédiatement. Ouvrez cette porte! »
Le médecin s’éloigne un peu plus dans le couloir en lâchant un « C’est pas vrai… »
De mon côté, j’ai l’impression que le temps s’est arrêté depuis notre départ de la maison.
A présent, la fatigue laisse la place à l’épuisement, j’ai de plus en plus de mal à controller ma respiration. De plus, mon coeur semble avoir des ratés.
En fait, la mort si proche me fait peur.
Je suis à bout de force.
La porte du monte charge s’est refermée depuis quelques minutes.
Je sens que je vais lâcher. Je roule les yeux pour scruter ce qui m’entoure. L’éclairage froid des néons et l’inox du monte charge sont mes seuls horizons. Ils m’ont laissé là, comme cela?
J’appelle: « Il ya quelqu’un, s’il vous plaît? Si vous êtes là, approchez-vous, je n’ai plus de force. Et si je meurs maintenant, que ce ne soit pas seul face à l’inox: je veux voir un visage humain. »
Je sens une main se poser sur mon épaule, puis je vois un pompier s’avancer.
Je plante mon regard dans le sien.
« Ca va aller. Tenez bon, je suis là. » me dit-il calmement.
Désormais, seuls mes battements de coeur et ma respiration comptent.
Je ferme les yeux, ma mort se rapproche, j’ai peur et je sens des larmes couler de mes paupières tout le long de mes joues.
5 commentaires
Rémy Pijcke
9 janvier 2020 at 13 h 04 minTop!
Lawl
10 janvier 2020 at 13 h 14 minÉtrangement moi qui est tjrs eu peur de la mort, j ai été très calme lorsque l on m’a amené aux urgences. Peut être la prise en charge des pompiers et infirmières qui m ont mis en confiance ou l incapacité de comprendre ce qui m arrivais…
Francis VERDET
10 janvier 2020 at 17 h 52 minQuestion peut être idiote 😉 : votre vie était-elle menacée à ce moment là?
Si c’était le cas, soit effectivement vous étiez trés confiant ou, comme vous l’écrivez, « inconscient de ce qui se vous arrivait ».
Certains m’ont expliqué qu’il se sentait incroyablement calme.
Visiblement: tous les cas de figure se produisent.
lawl
11 janvier 2020 at 9 h 20 minÉtrangement, je ne me posais pas la question de mon état dans le sens « qu’est ce qui m’arrive » j’acceptais juste la situation avec calme. Ce qui n’est pas dans mon caractère habituellement !
Et pour vous répondre, est que ma vie était menacé ?
Qui pouvais le dire ?
Je ne tenais ni debout, ni assis et j’ai eu des nausées, vomissements pendant 12h à cause de la perte d’équilibre.
Je pense que si j’avais pu avoir assez de recul j’aurais eu très peur !
Et pour finir ce calme je l’ai conservé un petit moment, même pendant ma phase de récupération. J’ai la chance de ne pas avoir de séquelle et d’avoir très vite récupéré. Par contre j’ai eu un contre coup moralement 2/3 mois après. Du style a oui mais merde, j’aurai pu mourir ou rester diminué !
Francis VERDET
12 janvier 2020 at 10 h 20 minOui, je comprends tout à fait cela.
Il m’arrive encore, à partir d’un mal de tête, de déclencher une crise d’angoisse.
La réaction mentale et émotionnelle peut être différée dans le temps.
Parfois, chez moi, c’est même totalement disproportionné avec la situation réelle.